• Conseil des ministres délocalisé : l’art de faire le numéro

    C'en est fait. Boni Yayi et ses ministres ont repris service. Pour cette rentée gouvernementale, après des vacances imaginaires, c'est Porto- Novo qui a abrité le premier conseil des ministres délocalisé dans un bâtiment colonial, symbole du mimétisme et de la condamnation à vie de la pensée nègre. Cette délocalisation d'une journée du conseil des ministres n'apporte rien au pays. Délocaliser le conseil des ministres à Porto-Novo pour faire rêver les populations de la capitale ne change rien, sauf qu'il a l'avantage de flatter l'ego de ses habitants, eux qui se rassasient souvent de paroles et de gestes d'éclat. S'enfermer dans un bâtiment colonial à Porto-Novo, pour discuter (est-ce que les ministres ont droit réellement à la parole ?) ne change rien au fait que les ministres restent loin des réalités des Béninois. Boni Yayi nous prouve qu'il est un homme de communication assez exceptionnel. Comme d'habitude, il fait son show médiatique ; tout dans l'apparence et rien d'autre. J'émets des réserves sur sa gouvernance, mais je ne peux qu'admirer sa méthode de communication. Ne faire que de la communication et dans l'apparence, cela peut marcher quelques temps, mais pas tout le temps. Cela dit, il faudrait bien élever le débat, pour dessiner des perspectives ; lesquelles sont en la nature du conseil des ministres sous le changement. Un conseil sans périodicité définie. Les ministres sont à la recherche de la démocratie. Mais ils ne doivent pas s'en plaindre pour peu qu'ils méditent Jean-Pierre Chevènement : " un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne ". Sous le Président Kérékou et Nicéphore Soglo, le conseil des ministres se découpait en 3 parties, dont chacune porte le nom d'une lettre de l'alphabet. La première partie de la réunion, appelée "partie A", concernait les projets de loi et les décrets qui doivent être signés. La "partie B" est consacrée aux nominations (chefs d'entreprises publiques, de la haute administration, etc.). Cette partie n'existe plus depuis l'arrivée de Boni Yayi à la Marina. Les ministres constatent avec aigreur le ralentissement du fonctionnement de leur administration. Enfin, la "partie C" correspond aux communications des ministres prévues à l'ordre du jour et qui varient selon l'actualité du moment et les projets de loi en cours. Ce fonctionnement rigide et immuable n'empêchait pas la libre expression. Le président de la République, Boni Yayi devrait moderniser ses conseils des ministres en leur retirant leur caractère figé, formel, afin d'en faire un lieu d'échanges entre ministres. Les ministres ont même peur d'aller en conseil, selon une confidence. Aux parties A, B et C, Boni Yayi devrait ajouter une quatrième partie, la "partie D" comme Débat, au cours de laquelle les ministres échangent leur point de vue en fonction du thème de la semaine. L'objectif serait de permettre à tout membre du gouvernement de s'exprimer sur des sujets qui ne sont pas forcément de son domaine de compétence, afin de rendre ce conseil plus dynamique, moins formel et plus utile. La liberté de ton des interventions des ministres au cours de "cette partie D", devrait faire jaillir la lumière si nécessaire, afin d'éviter les décisions ridicules souvent prises et qui font entrevoir par la suite une reculade. Avouons-le.

    Herbert Houngnibo

    La Presse du jour , Ed du 20 septembre 2007


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